Blessure d’humiliation : quand la honte empêche d’être soi-même
Certaines douleurs ne se disent pas. Elles se logent dans le silence, dans le regard baissé, dans le corps qu’on cache.
Parmi les blessures émotionnelles profondes, celle de l’humiliation est sans doute l’une des plus insidieuses. Elle agit en secret, à travers la honte, le dégoût de soi, la peur de ne pas être à la hauteur, ou de déranger.
En tant que sexothérapeute à Montpellier, je rencontre des personnes qui vivent difficilement leur corps, leur sexualité, ou leur rapport aux autres. En creusant, on découvre souvent une blessure d’humiliation non reconnue… et donc jamais apaisée.
Quand naît la blessure d’humiliation ?
Elle se met en place très tôt, entre 1 et 3 ans, au moment où l’enfant apprend à être propre, à parler, à manger seul. C’est une phase où il expérimente beaucoup de choses et… fait forcément des erreurs.
La blessure survient quand l’enfant est abaissé, moqué ou ridiculisé dans ces apprentissages :
- Un parent qui le gronde pour s’être sali
- Une remarque blessante sur son corps ou sa tenue
- Des paroles dévalorisantes autour de la sexualité (« tu n’as pas honte ? »)
- Une gêne du parent à propos du corps, du sexe ou de la nudité
- Une éducation très contrôlante, où l’enfant n’a pas le droit d’être libre
Cette blessure est souvent transmise inconsciemment par un parent lui-même humilié dans son enfance.
Le masque du masochiste : tout faire pour ne plus faire honte
Pour ne plus jamais revivre cette honte, l’enfant développe un masque : le masque du masochiste.
Il se met à prendre sur lui, à tout faire pour les autres, à porter les charges, les responsabilités, les drames… Il dit oui, même quand il voudrait dire non. Il devance les besoins, s’oublie, s’écrase parfois.
Il devient celui qui « ne fait pas honte ». Celui qui se rend utile, performant, propre, loyal, parfait.
Mais en se dévouant ainsi, il s’humilie lui-même. Il se prive de liberté, de plaisir, de désir personnel. Il prend beaucoup de place dans la vie des autres… mais pas dans la sienne.
Ce que le corps exprime
Le corps du masochiste parle fort, même quand la bouche se tait :
- Corps rond, notamment au niveau du ventre (zone de protection)
- Visage d’enfant, yeux ouverts, mâchoires tendues
- Surpoids vécu avec honte
- Tensions dans la gorge, le cou, le bassin
- Posture repliée ou trop contrôlée
- Vêtements trop grands, ou à l’inverse, souci excessif de l’apparence
Souvent, la personne masochiste a honte de son corps… tout en s’y accrochant comme une armure. Elle en veut à ses rondeurs, mais s’y abrite.
Dans la sexualité : tabous, blocages, gêne
La blessure d’humiliation touche de plein fouet la sexualité.
La personne croit que le sexe est « sale », « péché », « honteux ». Elle a souvent reçu ce message, même sans mots, dans le regard ou l’attitude d’un parent.
Elle peut :
- Se couper de ses fantasmes, ne pas oser les exprimer
- Avoir peur de se dévêtir, même devant son ou sa partenaire
- Multiplier les aventures sans s’y investir émotionnellement
- Avoir des comportements opposés à ses besoins réels
- Refuser ou fuir le plaisir, ou bien s’y abandonner sans limites comme un exutoire
Certaines personnes vivent une contradiction intense : elles aiment se balader nues, mais n’osent pas se montrer dans l’intimité. Elles cherchent une sexualité libre, mais se censurent par peur d’être jugées.
Une communication retenue
Le masochiste a souvent du mal à dire ce qu’il pense, ce qu’il veut, ce qu’il désire :
- Il a peur de blesser l’autre
- Il a peur d’être vu comme égoïste
- Il se sent vite indigne, coupable, sale
- Il garde tout pour lui, y compris les secrets de famille
- Il se blâme facilement, même pour ce qu’il n’a pas fait
Il fait souvent rire… en se moquant de lui-même. C’est une nouvelle forme d’auto-humiliation déguisée en humour.
Dans le quotidien : excès, performance, auto-sabotage
Ce masque s’exprime aussi dans la vie de tous les jours :
- La personne fait tout « trop » : trop travailler, trop manger, trop aider…
- Elle s’oblige à faire bonne figure, même si elle est épuisée
- Elle se sur-responsabilise, se crée des obligations sans fin
- Elle contrôle tout, de peur d’avoir honte
- Elle se punit inconsciemment : en oubliant de prendre soin d’elle, en se privant
Le sens du devoir est très fort. Elle veut être irréprochable. Et si elle échoue, elle s’en veut terriblement.
La honte est toujours là, tapie derrière l’effort, prête à ressurgir au moindre faux pas.
Maladies fréquentes associées à cette blessure
- Maux de dos : trop de poids émotionnel porté
- Problèmes de gorge : ce qui n’est pas dit
- Thyroïde : les besoins non exprimés
- Problèmes respiratoires : se laisse étouffer par les autres
- Crampes, varices, jambes lourdes : mauvaise circulation de l’énergie
- Diabète ou hypoglycémie : rapport difficile au plaisir (douceur interdite)
- Psoriasis, démangeaisons : difficultés à écouter ses besoins
- Dépression, honte chronique, impuissance émotionnelle
Comment commence la guérison ?
La première étape est de reconnaître cette honte. Non pas pour s’y complaire, mais pour cesser de la fuir.
Il s’agit de voir toutes les fois où l’on s’est senti indigne, abaissé, sale. Et de comprendre que ces sensations ne définissent pas qui l’on est. Elles sont les traces d’un passé, pas notre identité.
En thérapie, ce travail peut être délicat, mais profondément libérateur. Il permet de :
- Retrouver une vraie liberté intérieure
- Se reconnecter à ses désirs, à son rythme
- Se détacher du regard de l’autre
- Oser prendre sa place sans se faire violence
- Alléger le corps, symboliquement et parfois physiquement
Une clé essentielle : la compassion
Ce travail est d’autant plus puissant lorsqu’il s’accompagne de compassion envers ses parents.
Car eux aussi ont été blessés. Eux aussi ont eu honte. Et souvent, c’est leur propre blessure qu’ils nous ont transmise, inconsciemment.
Avoir de la compassion pour eux, c’est se permettre d’en avoir pour soi. Et c’est le premier pas pour se pardonner.
En conclusion
La blessure d’humiliation agit comme un poison silencieux. Elle se cache dans le surpoids, le silence, l’auto-dérision, l’effacement, la culpabilité.
Mais elle peut guérir.
Vous n’êtes pas ce masque.
Vous n’êtes pas votre honte.
Vous êtes une personne en chemin, qui mérite de se sentir libre, digne, aimée.
En tant que sexothérapeute à Montpellier, j’accompagne des personnes qui souhaitent mieux se comprendre, améliorer leurs relations et retrouver une liberté intérieure. L’un des outils puissants que j’utilise s’inspire des travaux de Lise Bourbeau, auteure de Les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même.
